La mise en scène
Seule en scène, Corinne Fischer est Alice. Sa singularité d’actrice la désigne tout naturellement pour se glisser entre les pages de Lewis Carroll. Elle est, avec les mots de Lewis Carroll, la matière première du spectacle.
Dans De l’autre côté du miroir , la jubilation passe par le langage. Et c’est dans cette jubilation des infinies possibilités fantaisistes du langage que l’actrice nous entraîne. C’est en disant qu’elle crée l’image, c’est le langage qui rend réel ce qu’elle a traversé.
Et c’est en disant qu’Alice se situe dans ce monde qu’elle vient de découvrir : je suis donc je parle, je parle donc je suis, et tant que je parle je suis ! La parole est l’épreuve physique qui la fait exister.
D’abord assise avec les spectateurs, Alice décide de traverser le miroir qui leur fait face. . Après cet instant, aussi fulgurant qu’un rêve, traversé de couleurs et de musiques chaotiques, elle réapparaît soudain et devant le miroir devenu mur, elle déplie son aventure pour tenter, en nous adressant ce récit, de reprendre pied dans le réel.
Mais alors qu’elle nous révèle ce qu’elle a vu, derrière elle, le mur s’anime d’ images et de sons, transcription des effets profonds et indicibles.
L'adaptation du texte
Dans ce que nous gardons du texte de Lewis Carroll, le premier principe est qu’Alice peut tout dire : ce qui lui passe par la tête, ce qu’elle garde pour elle, ce qu’elle voit, ce qu’elle dit, ce que disent les autres, ce qu’elle raconte. Les faits, les émotions, les hésitations, tout se transcrit en parole, partition virtuose à figures multiples pour actrice solo.
L’ouvrage compte onze chapitres comme une partie d’échecs en onze coups et nous suivons ce principe, comme un guide pour cette avancée à tâtons.
Nous avons fait un choix subjectif dans chaque chapitre, de l’un nous ne gardons qu’un instant, de l’autre un dialogue, d’un autre le long développement d’une situation, sans chercher de cohérence. Nous composons un texte dans lequel nous nous attachons à rendre compte des dédales que traverse Alice.
Ces dédales passent par:
- la description de ce qu’elle voit : le sentier brusquement bifurqua et s’ébroua.
- des discussions qui se finissent par des assertions à la logique implacable : Comment se fait-il que vous sachiez si bien parler? J’ai été déjà dans nombre de jardins, mais aucune des fleurs que j’y ai vues ne savait parler. - Mettez votre main par terre et tâtez le sol. Vous trouverez la réponse à votre question. - Le sol est très dur mais je ne vois pas le rapport entre ce fait et ce que je vous demande. - Dans la plupart des jardins on prépare des couches trop molles, de sorte que les fleurs y dorment tout le temps. - Je n’avais jamais pensé à cela jusqu’à présent!
- par l’expression de ses sensations ou de ses réflexions par devers elle : j’en restai pantoise, le souffle coupé une minute durant.
Elle passe donc sans cesse du je au nous au eux, de l’adresse à l’auditoire à l’adresse à elle-même à l’adresse à ce qu’elle voit, elle étant le fil narratif, se racontant.
Distribution
- Mise en scène : Agnès Bourgeois
- Alice : Corinne Fischer
- Musique : Fred Costa
- Image : Antoine Boutet
Production Compagnie Terrain de Jeu.
Co-réalisation avec le Théâtre de la Girandole et le Théâtre Berthelot.
Presse
"Alice (Corinne Fischer) se tient au milieu du petit plateau du théâtre de la Girandole, sur un drap blanc étalé au sol.
Derrière elle sont tendues trois voiles d’hivernage, comme le rideau des rêves, sur lesquelles sont projetées des images. Images fixes, floues et tremblantes, images cinématographiques. Images tantôt psychédéliques, hypnotiques, d’encre de chine, dessins, en expansion. Des damiers, une forêt qui n’en finit pas, des ombres, du récit médiéval, des formes. Une musique, tout aussi hypnotique, d’un genre techno planant, se marie parfaitement avec les obscures et floues images qui parcourent les voiles d’hivernage. Ce sont ces projections qui illuminent la scène et aucune gélatine n’est là pour éclairer Alice qui restera toujours dans l’ombre avec cet arrière volcanique à la frontière du rêve. On a un sentiment d’oppression dès le début, mais une oppression comme dans les rêves d’Alice, absurdes, de laquelle on voudrait à la fois se défaire mais dans laquelle il nous plait de rester comme échoués dans un monde imaginaire et fou. Corinne Fischer, dans son incarnation, nous communique avec justesse les états d’âme d’Alice et dit le texte avec tout ce qu’elle porte d’enfance en elle." Isabelle Buisson - Pianopanier.com - Novembre 2017
"Lewis Carroll aimait les Alice. Elles l’inspiraient. Après une histoire d’orange, de main droite et de main gauche et de miroir derrière lequel la main droite reste toujours la main droite, il décida d’écrire une suite aux aventures d’Alice. Mais cette fois-ci au lieu de l’expédier sous terre à la suite d’un lapin speedé, il lui fit traverser le miroir du salon, sous le titre explicite De l’autre côté du miroir et ce qu’ Alice y trouva . Un drôle de monde en vérité où tout est à l’envers, où le temps et l’espace sont chamboulés, où plus on court vite plus on reste sur place, où les sentiers bifurquent et s’ébrouent et vous laissent sous le même chêne que vous veniez de quitter et qui se dé-chêne, où les fleurs parlent, les reines se transforment en gigot ou en brebis tricoteuses à bésicles. Contrairement au « Pays des merveilles », ce n’est pas elle qui change de gabarit selon ce qu’elle mange ou boit, mais le paysage et les choses. Rien n’y est assuré, ce qui l’étonne sans l’effrayer. Précurseur des surréalistes – André Breton le qualifiait de « Maître de l’école buissonnière » - Lewis Carroll manie allègrement l’art du merveilleux et du non-sens et fait s’entrechoquer les mots et les choses dans d’incroyables fulgurances. C’est sa manière d’inventer un autre monde en réinventant la langue que s’attache à nous rendre sensible l’adaptation scénique que nous propose la compagnie Terrain de jeu. Destiné au jeune public mais à voir en famille, le spectacle est une partition pour une actrice seule en scène, Corinne Fischer, Alice qui raconte et se raconte tandis que derrière elle s’anime, en contrepoint, un mur d’images et de sons qui nous donne à imaginer l’univers dans lequel est plongée Alice. Une belle idée de mise en scène (Agnès Bourgeois) qui fait de cette petite forme « pour plateaux et hors les murs » un spectacle total qui nous rend sensibles les tribulations d’Alice." Dominique Darzacq - WebThéâtre - Novembre 2017
TTT - On aime passionnant
Alice rêve et passe de l'autre côté du miroir, là où l'envers est la règle, où l'on court pour rester sur place, où les reines se changent en brebis, où les petites filles deviennent reines... Ici, tout se transforme de façon inattendue, sans logique, jusqu'au chemin qui bifurque sans prévenir ! Pour incarner le personnage d'Alice, une comédienne, Corinne Fischer, seule en scène, assise et quasiment immobile devant un écran (miroir abstrait du rêve, transcrit en images et en sons). Avec son talent presque hypnotique à dire le mot, la phrase, à dérouler le fil narratif de l'histoire, à composer une rythmique, elle fascine, faisant exister par la parole images, personnages et situations de l'absurde. Une adaptation du roman de Lewis Carroll, admirablement mise en scène par Agnès Bourgeois, dans une épure élégante et fine. Télérama sortir - Françoise Sabatier-Morel - 14 février 2018
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