Opéra comique Fantastique en trois actes de Jacques Offenbach, un prologue et un épilogue. Livret de Jules Barbier, d’après sa pièce écrite en 1851 avec Michel Carré.
Note pour la mise en scène
Théâtre de foire, théâtre de tréteaux, enfants du paradis perdu , bouges alcoolisés, fumée et humeurs délictueuses, diables de pacotille, femmes faciles… un univers proche des mélodrames d’Eugène Sue et des romans feuilletons à la mode !
Nous avons trouvé tout cela dans l’imaginaire que m’a suggéré Lola Montès, le célèbre et dernier film de Max Ophuls !
Un cirque où l’on montre des femmes, un cirque où l’on montre la vraie vie mélangée à celle des gazettes et de nos imaginaires fiévreux.
C’est dans cet univers que nous situons ces Contes : une sorte de taverne où la table devient une piste de cirque pour monstres de foire ; les palissades : un paradis d’où l’on peut voir la fosse aux lions. Tout un échafaudage de poulies, de rideaux, de trappes, pour manier ce bateau à illusions et traverser la mer avec au solstice le goéland de Baudelaire.
C’est la mise en scène d’un spleen « lyrique » que demande Offenbach, une mélancolie drolatique et cruelle !
Dans un univers de fête foraine, on montre les trois femmes de l’histoire, le décor s’anime différemment comme les trois tableaux d’un music–hall… Le diable, le valet et Nicklauss sont les maîtres de cérémonie de cette mascarade enfumée. Ils s’amusent avec les autres comme des manipulateurs de pantins… Pendant ce temps-là, la foule des chœurs se régale à observer ces numéros de saltimbanques.
Voir, être vu, jouer, être joué, tous les personnages sont les pantins articulés de l’imaginaire de l’artiste : Hoffmann, que l’alcool embrume pour voir en une simple palissade une constellation de rêves…
Il y a dans la musique d’Offenbach un constant aller-retour entre la trivialité « bavaroise » de la taverne et l’élégance des secrets et des peines. Dans l’univers de cirque où nous situons le projet, on rit du clown, on frémit pour l’acrobate, on pleure avec l’amoureuse, et on ne sait jamais si on est dans le réel ou la fiction… les conventions, rideaux, trucages doivent nous faire croire réels les rêves d’Hoffmann car ce sont parfois les nôtres.
C’est la troisième fois que je mets en scène les Contes d’Hoffmann, c’est donc la troisième manière de voir les rêves d’Offenbach, le rêve des créateurs, le rêve des comédiens… Cette fois ci, je partage cette vision avec Benjamin Moreau, pour la première fois, le voyage va donc être différent, les pantins vont une fois de plus nous raconter une histoire à leur manière… Nous allons nous surprendre avec les artistes, et jouer, et comprendre que l’unique manière de monter cet ouvrage ce n’est pas de faire du nouveau à tout prix en donnant à notre époque sa dose d’ectoplasme, c’est chercher le moment ultime où le créateur frôle la folie et se noie dans la brume de ses rêves…
Œuvre ultime, œuvre nécessaire, testament :les Contes d’Hoffmann font partis de ces trois opéras, magiques et salvateurs qui aident leur auteur à se propulser dans l’éternité : Mozart avec sa Flûte – unique et ultime opéra où l’amour se réalise enfin, Falstaff – où le vieux Verdi tire une révérence en forme de pied de nez ludique et gourmand, et Offenbach qui réalise en partie ce qu’il n’a jamais pu faire : un… « Opéra ».
Olivier Desbordes et Benjamin Moreau
Réflexions sur la version
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Les Contes d’Hoffmann est un opéra inachevé : l’ultime œuvre de J. Offenbach, ce qui lui donne un aura particulier. Unique opéra reconnu de son auteur, ultime œuvre qui clôt des décennies de légèreté, ce testament révèle de manière parcellaire un deuxième Offenbach dont l’ambition n’est plus tant de plaire que de livrer le fond de lui-même.
Inachevée donc, cet opéra a été créé dans la version Choudens qui arrange l’œuvre et la termine en y ajoutant des passages… Il y a quelque chose qui rappelle le mystère du Requiem de Mozart (le musicien sérieux, et non celui des Champs-Elysées).
L’ouvrage était donc en travaux, c’est pour cette raison qu’on a retrouvé quantité de passages musicaux dans les archives… Chacun plaidant pour « sa version ». Pourquoi pas, puisque la porte était ouverte aux conjectures…
Il n’y a donc aucune version « certifiée » conforme, il n’y a dans ces conditions que des choix à faire.
Nous avons donc fait les nôtres : nous rapporter à la version Choudens en y restaurant les dialogues parlés et être ainsi plus fidèle à la forme « opéra comique » qui inspira son écriture.
En revanche , nous avons choisit un ordre des actes (prologue, acte 1 (Olympia), acte 2 (Julietta), acte 3 (Antonia), épilogue).
Cet ordre suit aussi l’ordre de l’évolution artistique d’Offenbach : Olympia reste une pièce dans la pure tradition d’Offenbach, on y rit, la situation est burlesque, la musique légère… Suit l’acte de Julietta ou une dimension plus sensuelle s’ajoute à l’écriture musicale, dimension qu’on trouve précairement dans certains ouvrages post 1870 (comme Le Roi Carotte). Cette sensualité de la musique amène une progression évidente dans l’ouvrage. Enfin, pour terminer, l’acte d’Antonia qui a valeur de symbole : Offenbach réussit là un acte dense, à l’écriture musical très dramatique, et à la tension émotive particulièrement réussie et concise. Il s‘agit, dans ce qui devient donc le dernier acte , de l’empêchement inconscient de faire de l’Opéra pour Offenbach et de chanter l’Opéra pour Antonia. L’acte ultime au prix de sa vie pour atteindre un rêve. Ce rêve nécessitant la mort, c’est ce qui impose que cet acte soit le dernier des trois.
On retrouve à l’épilogue l’artiste vidé de sa vie, pour le voir renaitre dans un élan tout « symboliste », à un autre âge…
A travers l’incohérence apparente de cet opéra, il y a un combat faustien entre Hoffmann, son diable et les femmes, l’éternel féminin – qui symbolisent la transcendance vers l’acte de créer et d’enfanter. En dehors des anecdotes de chacun des actes, à travers le personnage d’Hoffmann transparait une réflexion sur le rôle des artistes, et plus généralement, sur la création. C’est pour cela que j’ai tenté, à travers les textes parlés, de ne pas être fidèle et prosaïque en figeant le récit dans le factuel, mais de le mettre en échos aux ambiances et aux situations. J’ai emprunté des parcelles de mots à Baudelaire et à E.T.A. Hoffmann pour porter la quête d’Hoffmann vers les « merveilleux nuages », et mettre en valeur ce romantisme français qui ouvre la porte du symbolisme ésotérique.
L’air célèbre de Kleinsach (prologue) est à lui tout seul un conte d’E.T.A. Hoffmann (Le petit cinabre), partagé entre fantaisie burlesque – que demande le public – et désespoir amoureux caché sous le maquillage du clown amuseur public ! Cet air annonce la couleur de l’ouvrage qui n’est rien d’autre qu’une série de poupées russes qui se cachent les unes dans les autres : un conte d’E.T.A. Hoffmann qui se cache dans un autre conte, pendant qu’on joue Don juan dans la pièce à côté… Tels sont les méandres de cette oeuvre complexe qu’il ne faut parfois pas chercher à comprendre mais à sentir, comme une poésie lyrique et comme un testament mystérieux.
C’est le projet de notre version que nous allons partager avec le public :
« Il est l’heure de s’enivrer !
Pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous ;
Enivrez-vous sans cesse !
De vin, de poésie ou de vertu à votre guise ! »
Charles Baudelaire.
Distribution
- Metteur en scène : Olivier Desbordes
- Metteur en scène : Benjamin Moreau
- Direction musicale : Mehdi Lougraïda
- Hoffmann : Jean-Noël Briend
- Giuletta, Antonia, Olympia, Stella : Serenad B.Uyar
- Les diables : Christophe Lacassagne
- Les Valets : Eric Vignau
- Nicklausse / voix de la mère (en alternance) : Lamia Beuque
- Nicklausse / voix de la mère (en alternance) : Inès Berlet
- Luther, Crespel : Josselin Michalon
- Schlemil, Hermann : Yassine Benameur
- Spalanzani, Nathanaël : Lionel Muzin
- Opéra Eclaté : Choeur et Orchestre
- Costumes : Jean-Michel Angays
- Lumières : Joël Fabing
- Décors : Patrice Gouron
Coproduction : ScénOgraph - Scène Conventionnée Théâtre et Théâtre Musical - Figeac / Saint-Céré - Opéra-Éclaté / Opéra de Fribourg
Presse
"La nouvelle production de l’Opéra de Fribourg, Les contes d’Hoffmann, bénéficie d’une brillante réalisation musicale dans une mise en scène sobre et suggestive."
La Gruyere - Simon Rossier – janvier 2018
« Ce spectacle intrigant et cohérent, visuellement très abouti. »
Opéra Magazine - Jean-Luc Macia – janvier 2018
"Dès le prologue (« Drig, drig, drig »), l’excellente préparation musicale du chœur est une évidence. L’équilibre entre les voix est parfait, les articulations très précises et la diction impeccable. Dans les chœurs très typiques d’Offenbach où l’influence des chorals luthériens sont indéniable, les chanteurs, en parfaite osmose, manient avec brio les effets d’écho. Fort de sa bonne maîtrise de la palette sonore, le Chœur Opéra Éclaté endosse le rôle d’accompagnateur lors des envolées lyriques des solistes (« Belle nuit, ô nuit d’amour », acte II). Leur prestation est d’ailleurs chaudement applaudie à la fin de la représentation." Olyrix - Anne Heijboer - Mars 2018
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