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Trio en mi-bémol

Le Collectif Colette présente sa dernière création, Trio en mi-bémol. 

C’est l’histoire de Paul et Adèle. Une histoire simple de deux personnes qui se ratent, se retrouvent pour mieux se perdre. La musique seule, une certaine musique semble les rassembler, les transporter dans une passion commune. Là où le langage échoue, la musique alors pourra-t-elle les guérir? Trio en mi bémol est la seule pièce de théâtre que Rohmer a écrite. Forme légère pour deux acteurs, le spectacle se centre sur le doute de ce qui arrive à ces deux personnages (S’aiment-ils? Se cherchent-ils indéfiniment?) et leur déchirante incommunicabilité. La seule certitude qui demeure, c’est qu’ils se sont ratés, et qu’ils en souffrent ou souffriront tôt ou tard.

 

Extrait

Éric Rohmer, Trio en mi bémol

Laisse moi t'expliquer encore. Peut être que tu comprendras mieux. Disons que c'est une sorte de serment que je me suis fait à moi même. Mais ce n'est pas la forme du serment qui me lie. Ce qui me lie, c'est l'importance de l'enjeu. Et l'enjeu c'est toi, c'est ton être profond. J'ai fait un pari sur ton être profond, et j'en aurai ou non, si je puis dire, la possession, selon que je gagnerai ou que je perdrai.

 

Note d’intention

L’idée d’adapter au théâtre un autre film de Rohmer nous a parcourus, bien sûr. Comme chacun, je pourrais dire. Parce que la découverte au plateau d’un auteur, d’une langue, c’est toujours la volonté d’explorer encore et encore, d’avoir l’impression un moment que l’on comprendra vraiment ce qui se cache derrière les mots des poètes qu’on aime. C’est comme partir à Rome, et se dire qu’on aimerait voir Pompéi, Palerme ou Venise, selon les sensibilités. C’est comme les voyages, donc, c’est difficile de s’arrêter, ou pire, de se satisfaire.

Difficile de rompre avec Rohmer aussi, quand on projette les acteurs du Collectif Colette dans chacun des mots qu’il a écrits. C’est un peu comme les voyages, là-encore, on aime les faire avec les mêmes personnes.

Trio en mi bémol est donc une aventure de collectif, un pari de collectif aussi (ne pas faire jouer tout le monde), une histoire de collectif, celle d’un collectif qui tente encore de parler d’amour. L’histoire d’un collectif qui revient aux préceptes du discours amoureux de Rohmer.

Trio en mi bémol est la seule pièce de théâtre que Rohmer a jamais écrite entièrement, mise en scène et publiée. en scène et publiée. Ce texte nous apparaît comme le manifeste d’Eric Rohmer sur son écriture. Rohmer fait parler ici un homme et une femme qui dénoncent le langage comme l’ennemi du sentiment, le traître de la pensée. Comment dire ce que l’on sent, quels mots sont justes ?

A travers une très belle histoire, au travers de situations cocasses et de quiproquos, il dissémine la clé qu’il y a dans tous ses films : ses personnages parlent autant, non parce qu’ils sont bavards, mais parce qu’ils cherchent leurs mots. Non parce qu’ils sont oisifs, mais plutôt parce qu’ilssont exigeants. Non pas par temps, mais plutôt par nécessité. Seront-ils compris ou resteront-ils injustement considérés toute leur vie pour un pauvre mot échappé ?

Les personnages de Rohmer sont infiniment déterminés, parfois désespérés, incompris, envoûtés, infiniment sensibles, en somme infiniment vivants.

À la fois comme une réponse à Pauline à la plage,

à la fois comme une question, Trio en mi bémol se propose d’être à la fois un préambule d’une heure au spectacle Pauline, avec deux acteurs identiques, à la fois une forme solitaire s’adaptant rapidement à beaucoup d’espaces. Une forme que l’on désire voir jouée dans des salles de spectacles, mais aussi des réfectoires, des maisons de retraite, des médiathèques, des prisons... Une forme de 45 minutes, très légère, à la rencontre des territoires et des publics. Une forme au plus près des mots, au plus près de la délicatesse de trouver les bons. Une forme donnant à entendre la voix de Rohmer dramaturge, celle d’un expert du théâtre classique, qui retiendra de Marivaux ou de Corneille la raison du désemparement de leurs personnages, ce langage trop souvent utilisé à des fins de défi, de tests, ce langage qui tente d’exprimer le sentiment, mais qui finira peut-être un jour par anéantir l’amour.

Et nous n’aurons plus que nos yeux, dit le vieux dicton, les auteurs auront toujours les mots, disent d’autres, mais dans les deux cas, à quoi bon ?...

Distribution
  • Blaise Pettebone
  • Carine Goron
Représentations

Place des Écritures
  • lundi 24 juillet 2017 18h00
Informations / repli

En cas d'intempéries, la lecture aura lieu salle Balène.

Tarifs

gratuit

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