Dès les premières notes de l’ouverture de La Traviata, Verdi annonce la fin, ou bien ne se place-t-il pas déjà à la fin, pour remonter ensuite le passé avec le regard particulier qui caractérise la tragédie ?
C’est ce double point de vue qui guide ce projet. D’une part, une Violetta mourante qui se remémore le passé et d’autre part, une Violetta qui s’étourdit dans les apparences et le mirage social. D’une part, une Violetta lucide témoin de ses vains espoirs et d’autre part, une Violetta jeune et ambitieuse qui tente de sortir du déterminisme social par son unique sensualité.
D’une part, une Violetta qui a mis son masque social et d’autre part, à la fin de son histoire, une Violetta sans masque qui, rongée par la maladie « symbolique », observe avec lucidité la traversée des apparences et le miroir de l’univers des hommes.
Pour se faire, la Violetta dénudée des apparences, chantera et regardera une autre Violetta qui correspond au modèle social imposé par les conventions. La Violetta lucide sera filmée en direct et projetée sur le fond du décor tandis que sur scène un monde de fantômes normalisés s’ébattra dans un jeu social convenu et réglé.
La vision concomitante des deux phases de la personne (une sur scène, une sur l’écran) doit amener le spectateur à percevoir l’impasse où se trouve Violetta, les contradictions, la nécessité de la fin pour régler la question.
L’orchestre sera intégré dans l’espace scénique car la musique et ses exécutants font partie de « la règle du jeu », la salle de bal, son orchestre et ses danseurs participent à cette règle. C’est une société qui continue de « gigoter » alors qu’elle est au bord de la fin d’un siècle et d’un monde. Violetta, la courtisane ambitieuse sortie du roman de Zola, sorte de « nana » qui profite des feux de sa beauté pour échapper à la misère et s’étourdit dans l’amour artificiel et les compromis.
Costumes fin de siècle, estampes figées... espace vide peuplé de fantômes... c’est ainsi que la Violetta encore vivante se séparera de la Violetta à l’amour virtuel.
J’ai demandé au chef d’orchestre et à l’orchestrateur de travailler l’orchestre de chambre pour que celui-ci puisse différencier les atmosphères : d’un côté, l’écoute de la Violetta mourante et se remémorant son passé et de l’autre l’étourdissement de la fête. D’un côté la mélancolie d’un temps retrouvé opposé à une présence forte de l’autre.
On verra se confronter au cours de l’Œuvre l’apparence et la vérité, le subliminal et le concret... c’est le sujet de cet opéra, c’est le sujet volontairement choisit par Verdi, ce qui explique les problèmes qu’il a eus avec le public et la censure aux premières représentations.
Références cinématographiques :
Renoir, La règle du jeu
Bergman, Persona
Antonioni, Identification d’une femme
Distribution
- Direction musicale : Gaspard Brécourt
- Metteur en scène : Olivier Desbordes
- Collaborateur à la mise en scène : Benjamin Moreau
- Violetta : Serenad B.Uyar
- Alfredo : Julien Dran
- Giorgio : Christophe Lacassagne
- Flora : Sarah Lazerges
- Gaston : Eric Vignau
- Le Docteur Grenvil : Matthieu Toulouse
- Baron Douphol : Laurent Arcaro
- Le Marquis D'Obigny : Yassine Benameur
- Annina : Nathalie Schaaff
- Traviata muette : Fanny Aguado
- Décor et costumes : Patrice Gouron
- Lumières : Joël Fabing
- Chef de chant : Elisabeth Brusel
- Maquillage : Pascale Fau
- Vidéaste : Clément Chébli
- Choeur et orchestre Opera Eclate
Nouvelle production
Production : Festival de Saint-Céré – Opéra Éclaté.
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